Droit Aerien

Assurance/Exclusions de garantie

Droit de l’assureur de marquer la limite des risques qu’il accepte de couvrir moyennant le montant de la prime – CA PARIS, 17 décembre 2002, Sté Zurich international France c/ Febvay

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En vertu d'une clause d'exclusion, l'assureur peut, dans un contrat accepté et signé par l'assuré, marquer la limite des risques qu'il accepte de couvrir moyennant le montant de la prime stipulée par les parties. Dès lors, même si la victime n'avait pas sciemment recherché le danger au moment même de sa chute, elle n'en exerçait pas moins en toute conscience une activité dangereuse pour elle-même et, pour cela, proscrit par la police d'assurances.

[…]

Considérant, en premier lieu, qu’il n’existe pas de contestation sur le fait qu’en matière de navigation aérienne les termes « acrobatie » et « voltige » ont le même sens, le second étant tout simplement plus usité aujourd’hui que le premier ; Considérant, ce point étant évacué du débat, que les clauses excluant « les accidents résultant de la participation de l’assuré… à des exercices acrobatiques par lesquels l’assuré s’exposerait sciemment à un danger de mort, sauf l’acte de dévouement… » est d’autant plus clair que, dans la même clause, sont cités comme exemple de risques non couverts les participations à des courses d’automobiles, de motocyclettes, de canots automobiles, de meetings aériens, à des vols acrobatiques, etc. », et que, lecture faite de l’ensemble du texte, il est particulièrement clair que la compagnie d’assurance n’a pas seulement entendu décliner la garantie au seul cas d’exposition consciente au risque de mort à un moment donné, mais exclure de la garantie diverses activités considérées comme dangereuses par nature, et notamment l’acrobatie aérienne ; qu’il est d’ailleurs de notoriété publique que l’acrobatie aérienne est en effet dangereuse surtout pour un pilote non professionnel, non breveté et peu expérimenté dans cette discipline ; que sauf à être naturellement inconscient de l’ensemble des choses dangereuses de la vie, Pascal Febvay ne pouvait ignorer qu’il courrait des risques dès lors qu’il pratiquait la voltige aérienne surtout sans en avoir toute l’expérience et les qualifications ; que, d’ailleurs, l’eût-il oublié que l’ensemble de la rédaction de la clause ci-dessus reproduit ne pouvait que le lui rappeler à condition naturellement qu’il eût prêté attention aux termes du contrat qu’il avait signé ;

Considérant que peu importe ce qu’a dit sur ce point l’expert qui a d’ailleurs outrepassé sa mission en se livrant à une interprétation des faits à la lumière de stipulations contractuelles ;

Considérant que la clause d’exclusion, non ambiguë, n’est pas non plus contraire à un principe législatif quelconque, l’assureur ayant le droit, dans un contrat accepté et signé par l’assuré, de marquer la limite des risques qu’il accepte de couvrir moyennant le montant de la prime stipulée par les parties ;

Considérant que si certains témoins n’ont pu ou voulu attester que le vol relevait de l’acrobatie, certains, tels les gendarmes, étant arrivés après coup, ou d’autres n’ayant pas été des témoins directs ou ayant tenté d’atténuer après coup leur déclaration pour éviter de nuire à la veuve, il reste qu’il résulte des déclarations recueillies par l’expert lui-même, notamment un constructeur d’avions et des pilotes professionnels et instructeurs, que l’appareil, dont Pascal Febvay avait pris les commandes, avait été spécialement conçu pour la voltige de compétition, et qu’il avait même été modifié pour être plus efficace en voltige de haute compétition ; qu’il évoluait d’ailleurs dans une zone réservée par les autorités aux exercices de voltige ; que des pilotes instructeurs, Messieurs Lardemer, Charollais et Guerin avant de revenir ultérieurement (notamment Monsieur Lardemer) sur une partie de leurs déclarations, ont clairement indiqué à l’expert que Pascal Febvay avait été accidenté à la suite d’une mauvaise manoeuvre, après avoir exécuté des figures de voltige pendant une dizaine de minutes et ce aux commandes d’un avion spécialement conçu pour cette discipline et présentant la caractéristique de posséder une sensibilité aux commandes que n’ont pas les avions destinés aux simples loisirs ;

Considérant que s’il est bien évident que si P. Febvay n’a pas sciemment recherché le danger au moment même de sa chute, il n’en exerçait pas moins en toute conscience une activité dangereuse pour lui-même et, pour cela, proscrit par la police d’assurances ; qu’ainsi la Zurich rapporte bien la preuve que les conditions de l’exclusion étaient réunies en l’espèce ; Considérant, surabondamment, que l’enquête a révélé que P. Febvay ne possédait ni les brevets nécessaires pour se livrer à la voltige, ni même une expérience pratique suffisante, et que, dès lors, la deuxième clause d’exclusion invoquée devant la cour par la Zurich était elle aussi remplie ;

Considérant que, dans l’ensemble de ces conditions, la cour ne peut que réformer le jugement entrepris et débouter Roseline Febvay de ses demandes formées à l’encontre de la Zurich ; que l’appelant supportera les dépens de première instance d’appel, sans cependant que l’équité commande absolument de faire application de l’article 700 du nouveau code de procédure civile ;

Par ces motifs

Reçoit la compagnie Zurich international France en son appel, et l’y dit fondée,
Réforme en conséquence le jugement du 26 octobre 2000 en toutes ses dispositions entreprises,
Statuant à nouveau,
Déboute Roseline Febvay de toutes ses demandes formées à l’encontre de la compagnie Zurich international France, Rejette toute demande autre, contraire ou plus ample,
Dit n’y avoir lieu à application de l’article 700 du nouveau code de procédure civile,

Condamne Roseline Febvay aux dépens de première instance et d’appel, et, pour ces derniers, autorise la SCP d’avoués Xavier Varin et Marc Petit à les recouvrer directement selon les dispositions de l’article 699 du nouveau code de procédure civile.