Droit Aerien

Aéroports/Responsabilité/Infrastructure aéroportuaire

Entretien normal de l’ouvrage public et faute de la victime – CAA de Bordeaux, 15 novembre 2017, n° 16BX00343

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La chute sur la bordure du trottoir en travaux, doit être imputée non à un défaut d'entretien normal de la chaussée, mais uniquement à l'inattention et à l'imprudence de la victime dès lors que la dénivellation d’une dizaine de centimètres résultant de cet aménagement des lieux était parfaitement visible et de la nature de celles que tout piéton peut s’attendre à rencontrer de sorte qu’elle ne nécessitait aucune signalisation particulière.

 

Considérant ce qui suit :

1. Le 13 août 2008, aux environs de 21 heures, alors qu’elle regagnait un véhicule garé sur le parking de l’aéroport Rodez-Aveyron, Mme E… B… a, selon ses déclarations, mis le pied dans une dépression du sol causée par des travaux et a lourdement chuté sur la chaussée, occasionnant notamment une fracture bimalléolaire de la cheville gauche, une entorse de la cheville droite et une incapacité temporaire de travail de trente jours. A sa demande, le juge des référés du tribunal de grande instance de Rodez a missionné par une ordonnance du 3 juin 2010, le Dr A…, expert, aux fins notamment d’analyser l’imputabilité à l’accident des lésions constatées, le caractère direct et certain de cette imputabilité et d’évaluer l’ensemble des préjudices subis par Mme B… à la suite de cet accident. L’expert a rendu son rapport le 1er octobre 2010. Mme B… a alors assigné le 14 janvier 2011 devant ce même tribunal la société anonyme d’économie mixte locale (SAEML) Air 12, exploitant et gestionnaire de la plate-forme aéroportuaire, afin d’obtenir sa condamnation à réparer l’ensemble de ses préjudices. Le tribunal de grande instance de Rodez, par une ordonnance du juge de la mise en état en date du 20 octobre 2011, s’est déclaré incompétent en présence d’un dommage de travaux publics et a invité la plaignante à mieux se pourvoir. Après avoir adressé le 18 juin 2012 une demande préalable d’indemnisation à l’exploitant précité restée sans réponse, Mme B… a recherché devant le tribunal administratif de Toulouse la responsabilité solidaire du gestionnaire de la plate-forme, la SAEML Air 12, du syndicat mixte d’aménagement et d’exploitation de l’aéroport Rodez-Aveyron (SMAEARA) et de la société d’économie mixte (SEM) 12, respectivement maître d’ouvrage et maître d’oeuvre des travaux d’aménagement du parking de l’aéroport, en invoquant un défaut d’entretien de l’ouvrage public et un manquement aux obligations de signalisation et de sécurité des travaux incriminés, et a demandé leur condamnation à lui verser la somme de 22 854,51 euros en réparation de ses préjudices. Mme B… relève appel du jugement du 15 décembre 2015 par lequel le tribunal administratif de Toulouse a rejeté sa demande.

2. Il appartient à la victime d’un dommage survenu à l’occasion de l’utilisation d’un ouvrage public d’apporter la preuve du lien de causalité entre l’ouvrage public dont elle était usager et le dommage dont elle se prévaut. Dès lors, même sans faute de sa part, le maître de l’ouvrage est intégralement responsable des dommages causés aux usagers par les ouvrages publics dont il a la garde, à moins qu’il ne démontre avoir normalement entretenu l’ouvrage ou que ces dommages soient, au moins partiellement, imputables à une faute de la victime ou à un cas de force majeure.

3. Le tribunal a rejeté la demande de Mme B… au motif qu’ en se bornant à produire deux attestations d’une soeur et d’un ami qui l’accompagnaient indiquant qu’elle « a chuté sur la bordure du trottoir en travaux et non éclairé ni balisé » et une attestation du directeur de l’aéroport, dont il n’est pas contesté qu’il n’était pas témoin de l’accident et en l’absence de tout autre élément permettant de déterminer et de comprendre les circonstances exactes de l’accident notamment le lieu, l’état de la chaussée, la nature d’une éventuelle excavation dans le trottoir et sa profondeur, elle n’établissait pas le lien de causalité direct et certain entre les dommages subis et la défectuosité de l’ouvrage public incriminé, quand bien même des travaux d’aménagement de la voirie de la plate-forme aéroportuaire sur le parc de stationnement des véhicules étaient effectivement en cours de réalisation. Cependant, les photographies de l’ouvrage en cause, le caractère concordant des attestations produites et la circonstance que l’une des attestations, par ailleurs assez circonstanciée, émane d’une personne ne présentant ni de lien de parenté ou d’alliance avec la victime, ni de lien de subordination ni de communauté d’intérêts directs avec elles, en l’occurrence un ami de la soeur de Mme B…, permet de considérer comme établi le lien de causalité entre la chute de Mme B… et le rebord du trottoir en travaux.

4. Toutefois, il résulte de l’instruction, et notamment des photographies produites, que, à supposer que comme elle le soutient et l’indiquent les attestations, Mme B… ait chuté sur la bordure du trottoir en travaux, la dénivellation d’une dizaine de centimètres résultant de cet aménagement des lieux était parfaitement visible et de la nature de celles que tout piéton peut s’attendre à rencontrer de sorte qu’elle ne nécessitait aucune signalisation particulière. En outre, si Mme B… soutient que l’accident s’est produit de nuit, ses déclarations changeantes sur l’horaire de l’accident et l’absence d’éléments probants permettant d’établir cet horaire ne permettent pas de regarder cette circonstance comme établie. Dans ces conditions, la chute de Mme B… doit être imputée non à un défaut d’entretien normal de la chaussée, mais uniquement à l’inattention et à l’imprudence de la victime.

5. Il résulte de ce qui précède que Mme B… n’est pas fondée à se plaindre que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Toulouse a rejeté sa demande. Par conséquent, ses conclusions tendant au paiement des dépens et des frais exposés et non compris dans les dépens doivent être rejetées.

6. Dans les circonstances de l’espèce, il n’y a pas lieu de faire droit aux conclusions de la SAEML Air 12 et du SMAEARA présentées sur le fondement de l’article L. 761-1 du code de justice administrative.

DECIDE :

Article 1er : La requête de Mme B… est rejetée.

Article 2 : Les conclusions présentées par le SMAEARA et la SAEML Air 12 sur le fondement de l’article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à Mme E… B…, à la société anonyme d’économie mixte locale Air 12, au syndicat mixte pour l’aménagement et l’exploitation de l’aéroport de Rodez-Aveyron et à la société d’économie mixte 12.

 

Considérant ce qui suit :

1. Le 13 août 2008, aux environs de 21 heures, alors qu’elle regagnait un véhicule garé sur le parking de l’aéroport Rodez-Aveyron, Mme E… B… a, selon ses déclarations, mis le pied dans une dépression du sol causée par des travaux et a lourdement chuté sur la chaussée, occasionnant notamment une fracture bimalléolaire de la cheville gauche, une entorse de la cheville droite et une incapacité temporaire de travail de trente jours. A sa demande, le juge des référés du tribunal de grande instance de Rodez a missionné par une ordonnance du 3 juin 2010, le Dr A…, expert, aux fins notamment d’analyser l’imputabilité à l’accident des lésions constatées, le caractère direct et certain de cette imputabilité et d’évaluer l’ensemble des préjudices subis par Mme B… à la suite de cet accident. L’expert a rendu son rapport le 1er octobre 2010. Mme B… a alors assigné le 14 janvier 2011 devant ce même tribunal la société anonyme d’économie mixte locale (SAEML) Air 12, exploitant et gestionnaire de la plate-forme aéroportuaire, afin d’obtenir sa condamnation à réparer l’ensemble de ses préjudices. Le tribunal de grande instance de Rodez, par une ordonnance du juge de la mise en état en date du 20 octobre 2011, s’est déclaré incompétent en présence d’un dommage de travaux publics et a invité la plaignante à mieux se pourvoir. Après avoir adressé le 18 juin 2012 une demande préalable d’indemnisation à l’exploitant précité restée sans réponse, Mme B… a recherché devant le tribunal administratif de Toulouse la responsabilité solidaire du gestionnaire de la plate-forme, la SAEML Air 12, du syndicat mixte d’aménagement et d’exploitation de l’aéroport Rodez-Aveyron (SMAEARA) et de la société d’économie mixte (SEM) 12, respectivement maître d’ouvrage et maître d’oeuvre des travaux d’aménagement du parking de l’aéroport, en invoquant un défaut d’entretien de l’ouvrage public et un manquement aux obligations de signalisation et de sécurité des travaux incriminés, et a demandé leur condamnation à lui verser la somme de 22 854,51 euros en réparation de ses préjudices. Mme B… relève appel du jugement du 15 décembre 2015 par lequel le tribunal administratif de Toulouse a rejeté sa demande.

2. Il appartient à la victime d’un dommage survenu à l’occasion de l’utilisation d’un ouvrage public d’apporter la preuve du lien de causalité entre l’ouvrage public dont elle était usager et le dommage dont elle se prévaut. Dès lors, même sans faute de sa part, le maître de l’ouvrage est intégralement responsable des dommages causés aux usagers par les ouvrages publics dont il a la garde, à moins qu’il ne démontre avoir normalement entretenu l’ouvrage ou que ces dommages soient, au moins partiellement, imputables à une faute de la victime ou à un cas de force majeure.

3. Le tribunal a rejeté la demande de Mme B… au motif qu’ en se bornant à produire deux attestations d’une soeur et d’un ami qui l’accompagnaient indiquant qu’elle « a chuté sur la bordure du trottoir en travaux et non éclairé ni balisé » et une attestation du directeur de l’aéroport, dont il n’est pas contesté qu’il n’était pas témoin de l’accident et en l’absence de tout autre élément permettant de déterminer et de comprendre les circonstances exactes de l’accident notamment le lieu, l’état de la chaussée, la nature d’une éventuelle excavation dans le trottoir et sa profondeur, elle n’établissait pas le lien de causalité direct et certain entre les dommages subis et la défectuosité de l’ouvrage public incriminé, quand bien même des travaux d’aménagement de la voirie de la plate-forme aéroportuaire sur le parc de stationnement des véhicules étaient effectivement en cours de réalisation. Cependant, les photographies de l’ouvrage en cause, le caractère concordant des attestations produites et la circonstance que l’une des attestations, par ailleurs assez circonstanciée, émane d’une personne ne présentant ni de lien de parenté ou d’alliance avec la victime, ni de lien de subordination ni de communauté d’intérêts directs avec elles, en l’occurrence un ami de la soeur de Mme B…, permet de considérer comme établi le lien de causalité entre la chute de Mme B… et le rebord du trottoir en travaux.

4. Toutefois, il résulte de l’instruction, et notamment des photographies produites, que, à supposer que comme elle le soutient et l’indiquent les attestations, Mme B… ait chuté sur la bordure du trottoir en travaux, la dénivellation d’une dizaine de centimètres résultant de cet aménagement des lieux était parfaitement visible et de la nature de celles que tout piéton peut s’attendre à rencontrer de sorte qu’elle ne nécessitait aucune signalisation particulière. En outre, si Mme B… soutient que l’accident s’est produit de nuit, ses déclarations changeantes sur l’horaire de l’accident et l’absence d’éléments probants permettant d’établir cet horaire ne permettent pas de regarder cette circonstance comme établie. Dans ces conditions, la chute de Mme B… doit être imputée non à un défaut d’entretien normal de la chaussée, mais uniquement à l’inattention et à l’imprudence de la victime.

5. Il résulte de ce qui précède que Mme B… n’est pas fondée à se plaindre que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Toulouse a rejeté sa demande. Par conséquent, ses conclusions tendant au paiement des dépens et des frais exposés et non compris dans les dépens doivent être rejetées.

6. Dans les circonstances de l’espèce, il n’y a pas lieu de faire droit aux conclusions de la SAEML Air 12 et du SMAEARA présentées sur le fondement de l’article L. 761-1 du code de justice administrative.

DECIDE :

Article 1er : La requête de Mme B… est rejetée.

Article 2 : Les conclusions présentées par le SMAEARA et la SAEML Air 12 sur le fondement de l’article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à Mme E… B…, à la société anonyme d’économie mixte locale Air 12, au syndicat mixte pour l’aménagement et l’exploitation de l’aéroport de Rodez-Aveyron et à la société d’économie mixte 12.