Droit Aerien

Passagers indisciplinés (PAXI)

La légitimité du fichier interdisant le transport des passagers perturbateurs – Cass. soc., 18 janv. 2017, n° 15-21.802

MENU

La compagnie Air France était légitime à interdire de transport un passager, pendant dix-huit mois, compte tenu du comportement que celui-ci avait adopté au cours d’un vol précédent.

 

Texte intégral

[…]

COUR DE CASSATION

______________________

[…]

Rejet

M. FROUIN, président

Arrêt n° 108 FS-D

Pourvoi n° G 15-21.802

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

_________________________

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l’arrêt suivant :

Statuant sur le pourvoi formé par :

1°/ M. [K] [M], domicilié [Adresse 1],

2°/ le syndicat des pilotes d’Air France, dont le siège est [Adresse 2],

contre l’arrêt rendu le 21 mai 2015 par la cour d’appel de Paris (pôle 6, chambre 2), dans le litige les opposant à la société Air France, société anonyme, dont le siège est [Adresse 3],

défenderesse à la cassation ;

Les demandeurs invoquent, à l’appui de leur pourvoi, le moyen unique de cassation annexé au présent arrêt ;

Vu la communication faite au procureur général ;

LA COUR, composée conformément à l’article R. 431-5 du code de l’organisation judiciaire, en l’audience publique du 6 décembre 2016, où étaient présents : M. Frouin, président, Mme Lambremon, conseiller rapporteur, M. Huglo, Mme Geerssen, MM. Chauvet, Maron, Déglise, Mme Farthouat-Danon, M. Betoulle, Mmes Slove, Basset, conseillers, Mmes Wurtz, Sabotier, Salomon, Depelley, Duvallet, M. Le Corre, Mmes Prache, Chamley-Coulet, conseillers référendaires, M. Petitprez, avocat général, Mme Becker, greffier de chambre ;

Sur le rapport de Mme Lambremon, conseiller, les observations de la SCP Capron, avocat de M. [M] et du syndicat des pilotes d’Air France, de la SCP Rocheteau et Uzan-Sarano, avocat de la société Air France, l’avis de M. Petitprez, avocat général, et après en avoir délibéré conformément à la loi ;

Sur le moyen unique :

Attendu, selon l’arrêt attaqué (Paris, 21 mai 2015), que M. [M] bénéficie, en sa qualité de salarié de la société Air France, de billets de transport soumis à restrictions non commerciales dans le cadre du titre 14 « achats de billets » de la convention d’entreprise du 18 avril 2006 ; qu’à la suite d’un rapport du commandant de bord et de l’équipage commercial, mettant en cause son comportement, en tant que passager, pendant un vol, la direction des voyages du personnel et de l’interline de la société Air France l’a informé de sa décision de suspendre, pendant une durée de 18 mois, son droit d’accès à des billets de transport à prix réduit ; que le salarié a saisi la formation de référé du conseil de prud’hommes aux fins d’annulation de cette décision, d’injonction, sous astreinte, à la société Air France de le rétablir dans le plein exercice de son droit à des billets de transport à prix réduit et de condamnation de celle-ci au paiement d’une provision à valoir sur l’indemnisation des préjudices subis du fait de cette même décision ; que le syndicat des pilotes d’Air France est intervenu volontairement à l’instance ;

Attendu que le salarié et le syndicat font grief à l’arrêt de dire n’y avoir lieu à référé et de les débouter de leurs demandes, alors, selon le moyen :

1°/ que la décision par laquelle la société Air France prive temporairement l’un de ses salariés de l’avantage, constitué par l’attribution de billets de transport à prix réduit, accordé au personnel de la société Air France par les stipulations de la convention d’entreprise commune de la société Air France du 18 avril 2006, qui est lié à l’emploi de ce salarié et qui permet à celui-ci de réaliser une économie sur des vols d’avion, en raison d’une faute qu’elle impute à ce salarié dans le cadre de l’utilisation de tels billets de transport, constitue une sanction disciplinaire pécuniaire prohibée et, partant, caractérise un trouble manifestement illicite qu’il appartient au juge des référés de faire cesser ; qu’en retenant, dès lors, le contraire, pour dire n’y avoir lieu à référé et pour débouter M. [M] et le syndicat des pilotes d’Air France de l’ensemble de leurs demandes fondées sur l’existence d’un trouble manifestement illicite, la cour d’appel a violé les dispositions des articles L. 1331-1, L. 1331-2 et R. 1455-6 du code du travail, ensemble les stipulations du titre 14 de la convention d’entreprise commune de la société Air France du 18 avril 2006 ;

2°/ que la décision par laquelle la société Air France prive temporairement l’un de ses salariés de l’avantage, constitué par l’attribution de billets de transport à prix réduit, accordé au personnel de la société Air France par les stipulations de la convention d’entreprise commune de la société Air France du 18 avril 2006, qui est lié à l’emploi de ce salarié et qui permet à celui-ci de réaliser une économie sur des vols d’avion, en raison d’une faute qu’elle impute à ce salarié dans le cadre de l’utilisation de tels billets de transport, constitue une sanction disciplinaire pécuniaire prohibée, qui est manifestement illicite, et qui, partant, parce qu’elle prive ce même salarié d’un avantage conventionnel et parce qu’en conséquence, l’obligation de la société Air France de réparer le préjudice causé au salarié par sa décision n’est pas sérieusement contestable, ouvre droit pour ce salarié à l’indemnisation du préjudice qui en est résulté pour lui ; qu’en retenant, dès lors, le contraire, pour dire n’y avoir lieu à référé et pour débouter M. [M] de sa demande tendant à la condamnation de la société Air France à lui payer une provision à valoir sur la complète indemnisation des préjudices qu’il a subis, la cour d’appel a violé les dispositions des articles L. 1331-1, L. 1331-2 et R. 1455-7 du code du travail, ensemble les stipulations du titre 14 de la convention d’entreprise commune de la société Air France du 18 avril 2006 ;

3°/ que la décision par laquelle la société Air France prive temporairement l’un de ses salariés de l’avantage, constitué par l’attribution de billets de transport à prix réduit, accordé au personnel de la société Air France par les stipulations de la convention d’entreprise commune de la société Air France du 18 avril 2006, qui est lié à l’emploi de ce salarié et qui permet à celui-ci de réaliser une économie sur des vols d’avion, en raison d’une faute qu’elle impute à ce salarié dans le cadre de l’utilisation de tels billets de transport, constitue une sanction disciplinaire pécuniaire prohibée, qui est manifestement illicite, et qui, partant, parce qu’elle porte atteinte à l’intérêt collectif de la profession de pilote et parce qu’en conséquence, l’obligation de la société Air France de réparer le préjudice causé au syndicat professionnel que constitue le syndicat des pilotes d’Air France n’est pas sérieusement contestable, ouvre droit pour ce syndicat à l’indemnisation du préjudice qui en est résulté pour lui ; qu’en retenant, dès lors, le contraire, pour dire n’y avoir lieu à référé et pour débouter le syndicat des pilotes d’Air France de l’ensemble de ses demandes tendant à la condamnation de la société Air France à lui payer une provision à valoir sur la complète indemnisation des préjudices qu’il a subis et à publier, à ses frais, la décision à intervenir, la cour d’appel a violé les dispositions des articles L. 1331-1, L. 1331-2, L. 2132-3 et R. 1455-7 du code du travail, ensemble les stipulations du titre 14 de la convention d’entreprise commune de la société Air France du 18 avril 2006 ;

Mais attendu qu’ayant relevé que le contrat de transport entre la compagnie aérienne et les passagers prévoit la possibilité pour la société Air France de refuser le transport d’un passager pour des voyages ultérieurs à n’importe quel point du réseau lorsque par son comportement à bord, il met en danger l’appareil, une personne ou des biens ou qu’il empêche l’équipage de remplir ses fonctions ou qu’il ne se soumet pas aux recommandations et instructions de l’équipage, notamment si celles-ci concernent l’usage du tabac, de l’alcool ou de la drogue ou encore qu’il se conduise d’une manière qui entraîne ou peut entraîner, pour les autres passagers, pour l’équipage, une gêne à leur confort ou leur commodité, un dommage ou une blessure, et constaté, par des motifs non critiqués, que les faits reprochés à M. [M] en tant que passager entraient dans cette définition, la cour d’appel en a exactement déduit que la société pouvait, conformément aux stipulations de ce contrat, refuser son transport, comme celui de tout autre passager, pendant une durée de 18 mois, de sorte que la mesure prise par la société, sur cet unique fondement, ne constituait pas une sanction disciplinaire, au sens de l’article L. 1331-1 du code du travail ; que le moyen n’est pas fondé ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi ;

[…]