Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
La Compagnie nationale Royal Air Maroc a demandé au Tribunal administratif de Paris d’annuler la décision du 23 mars 2017 par laquelle le ministre de l’intérieur lui a infligé une amende de 10 000 euros.
Par un jugement n° 1708532 du 15 janvier 2019, le Tribunal administratif de Paris a annulé cette décision.
Procédure devant la Cour :
Par une requête, enregistrée le 18 mars 2019, le ministre de l’intérieur, demande à la Cour :
1°) d’annuler ce jugement du 15 janvier 2019 ;
2°) de rejeter la demande de la Compagnie nationale Royal Air Maroc devant le tribunal administratif.
[…]
Considérant ce qui suit :
1. Le ministre de l’intérieur relève appel du jugement du 15 janvier 2019 par lequel le Tribunal administratif de Paris a annulé sa décision du 23 mars 2017 infligeant une amende de 10 000 euros à la Compagnie nationale Royal Air Maroc pour avoir, le 2 mai 2016, débarqué sur le territoire français un passager de nationalité congolaise, en provenance de Casablanca, muni d’un passeport manifestement usurpé.
2. Les dispositions de l’article L. 6421-2 du code des transports et celles des articles L. 625-1 et L. 625-5 du code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile font obligation aux transporteurs aériens de s’assurer, au moment des formalités d’embarquement, que les voyageurs ressortissants d’Etats non membres de l’Union européenne sont en possession de documents de voyage leur appartenant, le cas échéant revêtus des visas exigés par les textes, non falsifiés et valides. Elles lui imposent à ce titre de vérifier que l’étranger est muni des documents de voyage et des visas éventuellement requis et que ceux-ci ne comportent pas d’éléments d’irrégularité manifeste, décelables par un examen normalement attentif des agents de l’entreprise de transport. En l’absence d’une telle vérification, à laquelle le transporteur est d’ailleurs tenu de procéder en vertu de l’article L. 6421-2 du code des transports, le transporteur encourt l’amende administrative prévue par les dispositions précitées.
3. Il résulte de l’examen des photographies figurant d’une part sur le passeport et d’autre part sur le document de circulation pour étranger mineur, documents tous deux présentés à l’embarquement par le passager en cause, qu’elles correspondent chacune à un jeune homme de type africain mais dont le regard, la forme du nez et de la bouche, ainsi que celle du visage, diffèrent très sensiblement. De plus, il est constant que la date de naissance portée sur chacun de ces documents diffère également. Dans ces conditions, les documents présentés à l’embarquement comportaient des éléments d’irrégularité manifeste, décelables par un examen normalement attentif des agents procédant à l’embarquement des passagers et c’est donc à tort que, pour annuler la sanction infligée à la compagnie aérienne, le tribunal administratif a retenu l’absence d’irrégularité manifeste.
4. Il appartient à la Cour, saisie de l’ensemble du litige par l’effet dévolutif de l’appel, d’examiner les autres moyens soulevés par la Compagnie nationale Royal Air Maroc devant les premiers juges.
5. Pour soutenir que le montant de l’amende, fixé à 10 000 euros, est manifestement disproportionné, la compagnie soutient que le prononcé systématique et automatique de l’amende à son montant maximum est contraire aux règles issues de la jurisprudence du Conseil constitutionnel et du Conseil d’Etat. Toutefois, il ne résulte pas de l’instruction que l’amende contestée lui ait été infligée sans examen des circonstances de l’espèce. Par ailleurs, la circonstance que le passager avait déjà passé avec succès deux filtres de sécurité avant d’arriver au poste d’embarquement ne suffit pas à démontrer que le montant de la sanction serait disproportionné.
6. Enfin, la compagnie ne peut utilement se prévaloir en appel de ce que le passager aurait été nécessairement interpellé par la police marocaine aux frontières ou par les agents de sûreté aéroportuaire si l’irrégularité était manifeste.
7. Il résulte de tout ce qui précède que le ministre de l’intérieur est fondé à soutenir que c’est à tort que le tribunal administratif a annulé sa décision du 23 mars 2017 et à demander l’annulation du jugement.
8. En ce qui concerne les frais liés à l’instance, la demande de la Compagnie nationale Royal Air Maroc tendant à ce qu’une somme de 2 500 euros soit mise à la charge de l’Etat sur le fondement de l’article L. 761-1 du code de justice administrative doit être écartée dès lors que l’Etat n’est pas la partie perdante dans la présente instance.
DÉCIDE :
Article 1er : Le jugement n° 1708532 du 15 janvier 2019 du Tribunal administratif de Paris est annulé.
Article 2 : La demande de la Compagnie nationale Royal Air Maroc devant le tribunal administratif et ses conclusions d’appel présentées sur le fondement de l’article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié au ministre de l’intérieur et à la Compagnie nationale Royal Air Maroc.