COMPOSITION DU TRIBUNAL :
Lors des débats et de la mise à disposition :
Madame Louise LAGOUTTE, vice-président, statuant en juge unique.
Madame Elisabeth LAPORTE, greffier présente lors des débats et de la mise à disposition,
[…]
DEBATS:
A l’audience publique du 03 Janvier 2022
JUGEMENT:
Contradictoire
en premier ressort
Par mise à disposition au greffe
DEMANDEUR
M. X
XXX
représenté par Me Houssam OTHMAN-FARAH, avocat au barreau de BORDEAUX
DEFENDERESSE
XL INSURANCE COMPANY SE Venant aux droits de la SA AXA CORPORATE SOLUTIONS ASSURANCE Société Anonyme, qui avait son siège 61 RUE MSTISLAV ROST OPOVITCH- 75017
PARIS, par suite d’une fusion transfrontalière à effet du 31.12.2019
61 RUE MSTISLAV ROSTROPOVITCH
75017 PARIS
représentée par Maître Fabrice DELAVOYE de la SELARL DOD AVOCATS, avocats au barreau de BORDEAUX, Maître Thierry MAZOYER de la SCP CHEVRIER & ASSOCIES, avocats au barreau de PARIS
EXPOSE DES FAITS ET DE LA PROCEDURE
M. X exerce une activité d’enseignement de pilotage d’aéronefs ultra légers motorises (ULM) sur la commune de GUJAN-MESTRAS.
Il a été propriétaire d’un appareil ULM PAPANGO identifie sous le numéro 33 AHS, anciennement 41PR.
M. X a, par l’intermédiaire du courtier AISCALEASSURANCE lui-même passé par l’intermédiaire d’un autre courtier la société SAAM VERSPIEREN GROUP, fait assurer, le 20 janvier 2014, cet appareil auprès de la compagnie AXA CORPORA TE SOLUTIONS ASSURANCE aux droits de laquelle vient désormais la compagnie XL INSURANCE COMPANY SE.
L’ULM a été accidente le 16 mai 2017.
L’enquête a conclu que M. Z, seul pilote à bord de l’ULM, a souhaité décoller de l’ aérodrome de VILLEMARIE, qu’ il s’ est aligne sur une piste en service, a commencé le roulage avant de décoller, l’ aéronef vire à droite sans aucune explication, le pilote a tenté de rectifier la trajectoire sans succès, l’aéronef est sorti de la piste, a traversé les accotements, a défonce la clôture et a terminé sa course à l’entrée d’un tas de terre après avoir traversé l’avenue de l’aérodrome.
Le pilote en est sorti indemne mais l’ULM a été gravement endommagé.
La compagnie AXA CORPORATE SOLUTIONS a missionné M. Y en qualité d’expert technique qui a constaté les dommages sur l’appareil et a conclu que ce sinistre pouvait être réglé pour la somme totale de 28.000 € correspondant à la valeur estimée de l’aéronef, minorée d’une valeur de sauvetage estimée au minimum à 3.000 €, franchise de 1.500 € à déduire, soit un montant net de 23.500 €.
Par courrier du 19 septembre2017, la compagnie AXA CORPORATE SOLUTIONS ASSURANCE informait le courtier VERSPIEREN qu’elle n’interviendrait pas dans ce sinistre aux motifs que les conditions de la garantie faisaient défaut dans la mesure ou l’appareil accidenté était dépourvu d’accusé réception de déclaration d’aptitude au vol d’un ULM depuis la fin du mois de mars 2017.
Après plusieurs échanges amiables entre la compagnie et le conseil de M. X, celui-ci a, par acte délivre le 8 octobre 2020, fait assigner devant le présent tribunal la société XL INSURANCE COMPANY SE venant aux droits de la compagnie AXA CORPORATE SOLUTIONS ASSURANCE.
Aux termes de son assignation, M. X demande au tribunal, au visa des articles L. 112-1, L. 113-1 et L. 141-4 du Code des assurances et R. 133-1-2 du Code de l’aviation civile, et sous le bénéfice de l’exécution provisoire, de :
– juger la garantie d’assurance d’AXA CORPORATE SOLUTIONS ASSURANCE, aux droits de laquelle vient à présent la société XL INSURANCE COMPANY SE, est acquise pour le sinistre du
16 mai 2017 ;
– condamner la société XL INSURANCE COMPANY SE venant aux droits de la société compagnie AXA CORPORATE SOLUTIONS ASSURANCE a verser a M. X la somme de 28.000 euros au titre de l’indemnité d’assurance due dans le cadre du sinistre survenu le 16 mai 2017, avec intérêts a compter du 27 avril 2018, date de la mise en demeure ;
– condamner la société XL INSURANCE COMPANY SE venant aux droits de la compagnie AXA CORPORATE SOLUTIONS ASSURANCE à verser à M. X 20.000 € de dommages et intérêts pour le préjudice lié à la perte d’ exploitation subie jusqu’à ce jour, à parfaire au jour du jugement;
– condamner la société XL INSURANCE COMPANY SE venant aux droits de la société compagnie AXA CORPORATE SOLUTIONS ASSURANCE a la somme de 3.000 € sur le fondement de
I’ article 700 du Code de procédure civile ;
– condamner la société XL INSURANCE COMPANY SE venant aux droits de la société compagnie, AXA CORPORATE SOLUTIONS ASSURANCE aux entiers dépens.
Aux termes de ses conclusions notifiées par voie électronique le 6 mai 2021, la compagnie XL INSURANCE COMPANY SE, demande au tribunal, au visa des articles 1315, 1134 ancien et 1103 du Code civil, R. 113-2-1 du Code de l’aviation civile et les dispositions de l‘arrêté du 23 septembre 1998, de :
A titre principal,
– dire et juger que les conditions générales de la police d’assurancen°XFR0059470AV14A/116 sont opposables à M. X ;
– dire et juge que M. X ne rapporte pas la preuve de la réunion des conditions de garantie ;
– dire et juger en tout état de cause que les conditions de la garantie d’assurance revendiquée par M. X ne sont pas réunies;
En conséquence,
– débouter M. X de l’ ensemble de ses demandes, fins et conclusions ;
A titre subsidiaire,
– dire et juger que le montant dû au titre de la garantie d’assurance ne saurait excéder 23.500 €;
– débouter M. X de sa demande de dommages et intérêts au titre de la perte d’ exploitation,
En tout état de cause,
– condamner M. X à payer à la compagnie XL INSURANCE COMPANY SE la somme de 4.000 € au titre de l’article 700 du Code de procédure civile.
Pour l’exposé des moyens venant au soutien de ces demandes, il est renvoyé aux conclusions écrites des parties.
L’ordonnance de clôture a été rendue le 12 octobre 2021 et l’affaire a été appelée à l’audience du 3 janvier 2022 au cours de laquelle elle a été retenue puis mise en délibéré par mise à disposition au greffe a la date de ce jour, les parties en ayant été informées selon les modalités de l’article 450 alinéa 2 du Code de procédure civile.
Il sera statue par jugement contradictoire.
MOTIFS DE LA DECISION
Sur l’opposabilité des conditions générales
M. X soutient que les conditions générales invoquées par l’assureur tant dans son courrier du 19 septembre 2017que les conditions générales du 17 mai 1989 invoquées par la défenderesse dans ses conclusions ne lui sont pas opposables dans la mesure où celles-ci n’ont pas été portées à sa connaissance.
La compagnie XL INSURANCE COMPANY SE conteste cette position en soutenant qu’un exemplaire des conditions générales a et remis à M. X au moment de la souscription.
L’article L. 112-2 du Code des assurances dispose que l’assureur doit obligatoirement fournir une
fiche d’information sur le prix et les garanties avant la conclusion du contrat et qu’avant la conclusion du contrat, l’assureur remet à l’assure un exemplaire du projet de contrat et de ses pièces annexes ou une notice d’information sur le contrat qui décrit précisément les garanties assorties des exclusions, ainsi que des obligations de l’assuré.
Il ressort du contrat de la police n° XFR0059470A VI 4A/116 verse aux débats que ce contrat, souscrit
– par M.X pour assurer l’ULM, « est constitué par les Conditions Générales référence 17009/DA du 17.05.1989 », que ce contrat stipule en page 12 que << le souscripteur reconnait, par sa signature apposée ci-dessous, avoir été mis en possession d’un exemplaire des Conditions Générales et Particulières du contrat ainsi que des conventions annexes afférentes aux garanties accordées.», et qu’un courrier du 20 janvier 2014 émis par le courtier en assurance indique à M. X « au cours de nos échanges, vous nous avez expose votre situation personnelle et communique les éléments préalables à la souscription de ce contrat. À partir de ces informations, et au regard de vos objectifs, besoins et exigences, nous vous avons établi un projet de contrat dont les Conditions Générales et les Conditions Particulières vous ont été remises ».
S’il est vrai que ce contrat d’assurance date du 20/01/2014 produit par le requérant n’est pas signé par lui, il est en possession de cette pièce et ne conteste pas que ce contrat a été exécuté par les deux parties, notamment s’agissant du paiement des primes. Par ailleurs, le fait qu’il produise des conditions générales référencées datées du 17.05.1989 qu’il dit avoir trouvées sur internet est sans effet dès lors qu’il a reconnu en avoir pris connaissance dans le contrat qu’il possède et qui a été exécuté par les parties.
En tout état de cause, le demandeur ne saurait valablement soutenir que ces conditions générales ne lui sont pas opposables tout en demandant la mobilisation de la garantie et le paiement de l’indemnité d’assurance qui ne peuvent être déterminées que par référence à ces conditions générales.
Il convient donc de dire que les conditions générales DA 17.05.1989 sont opposables à M. X et déterminent la garantie de l’assurance sur l’ULM sinistre.
Sur le refus de garantie
M. X soutient que la clause opposée par l’assureur afin de denier sa garantie est une clause d’exclusion, que celle-ci doit donc être formelle et limitée, que la clause en question exige que l’aéronef soit pourvu d’un certificat de navigabilité ou d’un laissez-passer officiel valide et non périmé, que le champ de limitation de la garantie ne saurait donne être étendu à d’autres documents telle que la carte d’identification de l’aéronef.
La compagnie d’assurance soutient au contraire que la clause litigieuse ne constitue pas une clause d’ exclusion mais une clause précisant les conditions de la garantie, qu’au regard de la règlementation en vigueur, les ULM peuvent être dispenses du certificat de navigabilité des lors que l‘aéronef est muni d’une carte d’identification et d’une fiche d’identification accompagnée d’un accuse de réception de la déclaration d’aptitude au vol, qu’au moment du sinistre l’ULM circulait sans carte d’identification valide, que celui-ci n’était donc pas règlementairement en état de voler et qu’en conséquence les conditions de la garantie ne sont pas réunies.
Il est verse aux débats les Conditions générales du contrat d’assurance aéronef DA 17 mai 1989. Son article 5 stipule que « la garantie du présent contrat n ‘est pas engagée lorsque les conditions ci-après ne sont pas remplies alors que l’aéronef est en évolution :
a) l ‘aéronef doit être apte au vol conformément aux prescriptions techniques règlementaires et pourvu d’un certificat de navigabilité (ou d’un laissez-passer officiel) valide et non périmé, b)L’aéronef doit être utilise dans les limites des annotations portées sur son certificat-de navigabilité ou sur son laissez-passer officiel et conformément aux agréments et/au autorisations reçues par l’exploitant
[…]
En particulier, le vol ne devra pas être entrepris ou poursuivi en infraction avec la règlementation concernant les conditions de vol et les qualifications qui s’y trouvent attachées, ce, quel que soit l’équipement de l’aéronef
La garantie est exclue même si les infractions visées par les alinéas a), b) et c) ci-dessus ne sont pas la causes de l‘accident ».
Des lors que cette clause n’a pas pour objet de priver l’assure de la garantie lorsque le risque se réalise dans certaines circonstances mais qu’elle délimite le champ d’application de la garantie en mettant à la charge de l’ assure certaines obligations permanente, cette clause ne saurait être qualifiée de clause d’ exclusion, qu’ il s’ensuit que les exigences de l’article L. 113-1 du Code des assurances, qui exige que les clauses d’exclusions présentent un caractère formel et limite, ne lui sont pas applicables.
S’agissant du respect des conditions posées par la clause litigieuse, le requérant soutient qu’elles sont respectées des lors que ces conditions générales ne stipulent aucune production d’un accuse de réception émis depuis moins de 24 mois par l’administration à réception de la carte d’identification visée par l’arrêté du 6 février 2014 ayant modifié l’arrêté du 23 septembre 1998 relatif aux ULM (article 5-1). En tout état de cause, il considère que cet accuse de réception n’est qu’une simple formalité, l’administration ne procédant à aucun contrôle ou vérification et rappelle que sa carte d’identification avait été délivrée pour une durée illimitée à compter du 30 mars 2015. Il souligne que l’ULM était en parfait état de vol au jour de l’accident.
La compagnie AXA soutient que la garantie n’est pas acquise en application des clauses susvisées des lors que l’ULM devait à tout le moins bénéficier d’une carte d’identification avec accuse de réception de moins de 24 mois, ce qui n’était pas le cas, la carte d’identification étant périmée depuis 47 jours au moment des faits. En vertu de l’article R. 133-1 du Code de l’aviation civile, un aéronef ne peut être utilisé pour la circulation aérienne que s’il est muni d’un document de navigabilité en état de validité ce document propre à chaque appareil, peut être soit un certificat de navigabilité soit un certificat de navigabilité spécial, soit un laissez-passer provisoire.
Aux termes de l’article R. 133-1-2 du même code, les aéronefs monoplaces ou biplaces non motorises ou faiblement motorisés définis par le ministre charge de l’aviation civile peuvent faire l’objet de l’exemption de certaines obligations énumérées aux articles R. 133-1 et R. l 33-1-1 « à condition de respecter des dispositions particulières fixées par arrêté du ministre charge de l’aviation civile et portant, en tant que de besoin, aussi bien sur la conception des appareils que sur les conditions de leur emploi et sur les capacités requises des personnes qui les utilisent ».
L’arrêté du 23 septembre 1998 relatifs aux aéronefs ultra légers motorisés dispose que la carte d’identification de l’ULM est visée et délivrée par le ministre charge de l’aviation civile et que la durée de validité de cette carte est illimitée, sous réserve qu’elle soit accompagnée d’un accuse réception émis depuis moins de vingt-quatre mois par l’administration à réception d’une déclaration du postulant indiquant que son ULM est apte au vol.
En l’espèce les parties s’accordent sur la règlementation applicable à l’aéronef et sur la nécessité qu’il détienne, en application de l’article R 133-1-2 du code de l’aviation civile, une simple carte d’identification et non l’un des documents vises l’article R 133-1 du code de l’aviation civile.
Néanmoins, il n’est pas contesté que la carte d’identification de l’ULM sinistre était dépourvue au moment de l’accident, de l‘accusé de réception de moins de 24 mois de la déclaration indiquant que l‘appareil était apte au vol puisqu’ il n’est produit que la carte d’identification du 13 mars 2013 valable deux ans et celle du 30 mars 2015 précisant que sa durée est « illimitée sous réserve que la carte soit accompagnée d’un accuse de réception émis depuis moins de 24 mois par l‘administration à réception d’une déclaration du postulant indiquant que son ULM est apte au vol. Or, le requérant n’invoque aucune déclaration de moins de 24 mois indiquant que son appareil était apte au vol.
Il en résulte que I ‘ULM ne pouvait voler au regard des exigences règlementaires, celui-ci étant dépourvu de certificat de navigabilité ou de laissez-passer officiel, ici la carte d’identification accompagnée de l’accuse de réception, et que le vol a été entrepris en infraction avec la règlementation concernant les conditions de vol.
La clause de garantie invoquée par l’assureur doit donc recevoir application, cette clause n’étant ni trop générale, ni imprécise dès lors qu’elle reprend à l’identique 1es exigences de l’article R. 133-1 du code de l’aviation civile, et qu’elle n’exclut de garantie que les aéronefs en infraction avec la règlementation concernant les conditions de vol et les qualifications qui s’y trouvent attachées, soit, pour les ULM ceux qui ne disposent pas d’une carte d’identification et d’un accuse de réception émis depuis moins de 24 mois par l’administration à réception de la déclaration du postulant indiquant que son ULM est apte au vol. Les parties font d’ailleurs la même lecture de la règlementation applicable.
Dans ces conditions et en application des conditions générales du contrat d’assurance, la garantie n’est pas acquise et il convient de débouter M. X de sa demande en paiement de l’indemnité d’assurance. De même, en l’absence de faute et de lien de causalité avec la perte d’exploitation subie par M. X, il convient de rejeter les demandes en paiement de dommages-intérêts dirigées contre la compagnie XL INSURANCE COMPANY SE.
Sur les autres dispositions du jugement
Succombant à la procédure, M. X sera condamne aux dépens.
D’autre part, il n’est pas équitable de mettre à la charge de M. Xune indemnité au titre de l’article 700 du Code de procédure civile. La compagnie XL INSURANCE COMPANY SE sera donc déboutée de cette demande.
Par ailleurs, rien ne justifie d’écarter l’ exécution provisoire de droit prévue par l’article 514 du Code de procédure civile.
PAR CES MOTIFS
Le Tribunal,
Après en avoir délibéré, statuant publiquement par décision mise à disposition au Greffe, contradictoire et en premier ressort,
DIT que les conditions générales intitulées contrat d’assurance aéronef du 17 mai 1989 sont opposables à M. X;
DIT que la garantie du contrat d’assurance n° XFR0059470AV14A/116 n’est pas acquise pour le sinistre du 16 mai 2017 ;
DEBOUTE M. X de sa demande en paiement de l’indemnité d’ assurance et de sa demande en paiement de dommages-intérêts pour la perte d’exploitation;
DEBOUTE la compagnie XL INSURANCE COMPANY SE de sa demande au titre de l‘article 700 du Code de procédure civile ;
DIT que M. X sera condamné aux dépens
DIT n’y avoir lieu à écarter l’exécution provisoire de droit de la présente décision.