Droit Aerien

Aéroports/Environnement

Méconnaissance du principe de non-régression de la protection environnementale – CE, 9 juill. 2021, n° 439195

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La possibilité de déroger sans limite à l'interdiction d'atterrissage nocturne méconnaît le principe de non-régression de la protection de l'environnement. Il incombait à l'administration d'une part d'encadrer le trafic aérien nocturne qui pourrait résulter de l'octroi de ces dérogations, et d'autre part, d'indiquer les motifs d'intérêt général qui justifient de telles dérogations.

[…]

 

Considérant ce qui suit :

1. Par un arrêté du 25 avril 2002, le ministre de l’équipement, des transports et du logement a instauré des restrictions d’exploitation de l’aérodrome de Beauvais-Tillé interdisant notamment à tout aéronef d’atterrir ou de décoller entre 0 heure et 5 heures, heures locales de départ ou d’arrivée sur l’aire de stationnement, et aux avions les plus bruyants d’atterrir ou décoller entre 22 heures et 7 heures du matin. Modifiant ces dispositions, l’arrêté du 26 décembre 2019 a prévu, en son article 1erque le ministre chargé de l’aviation civile peut, au cas par cas, autoriser des dérogations à cette interdiction d’atterrissage nocturne, dans les conditions qu’il fixe. L’association de Défense de l’Environnement des Riverains de l’aéroport de Beauvais-Tillé, l’association Regroupement des organismes de sauvegarde de l’Oise et l’association contre les nuisances de l’aéroport de Tillé doivent être regardées comme demandant l’annulation pour excès de pouvoir de l’article 1er de cet arrêté.

2. Aux termes du II de l’article L. 110-1 du code de l’environnement, les autorités s’inspirent, dans le cadre des lois qui en définissent la portée, du « principe de non-régression, selon lequel la protection de l’environnement, assurée par les dispositions législatives et réglementaires relatives à l’environnement, ne peut faire l’objet que d’une amélioration constante, compte tenu des connaissances scientifiques et techniques du moment ».

3. Les dispositions de l’arrêté attaqué donnent au ministre chargé de l’aviation civile le pouvoir d’accorder, au cas par cas, aux aéronefs effectuant des vols réguliers de transport de passagers et performants d’un point de vue acoustique, dont le dernier atterrissage était prévu entre 21 heures et 23 heures et dont le décollage est prévu le lendemain après 5 heures, le droit d’atterrir la nuit sur l’aéroport de Beauvais, par dérogation à l’interdiction posée par l’arrêté du 25 avril 2002, sans que soit limité le nombre de ces autorisations dérogatoires. Faute pour l’administration, d’une part, d’avoir encadré le surcroît du trafic aérien nocturne qui pourrait résulter de l’octroi de ces dérogations et d’autre part, d’avoir indiqué les motifs d’intérêt général qui pourraient le cas échéant les justifier, les associations requérantes sont fondées à soutenir que l’arrêté attaqué méconnaît les dispositions du 9° du II de l’article L. 110-1 du code de l’environnement. posant le principe de non-régression de la protection de l’environnement.

4. Il résulte de ce qui précède, sans qu’il soit besoin d’examiner les autres moyens de la requête, que les associations requérantes sont fondées à demander l’annulation pour excès de pouvoir de l’article 1er de l’arrêté qu’elles attaquent.

5. Il y a lieu dans les circonstances de l’espèce, de mettre à la charge de l’Etat le versement d’une somme de 700 euros à chacune des associations requérantes au titre des dispositions de l’article L. 761-1 du code de justice administrative.

D E C I D E :

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Article 1er : L’article 1er de l’arrêté du secrétaire d’Etat auprès de la ministre de la transition écologique et solidaire, chargé des transports, du 26 décembre 2019 relatif aux restrictions d’exploitation de l’aérodrome de Beauvais-Tillé est annulé.

Article 2 : L’Etat versera à l’association de Défense de l’Environnement des Riverains de l’aéroport de Beauvais-Tillé, à l’association Regroupement des organismes de sauvegarde de l’Oise et à l’association contre les nuisances de l’aéroport de Tillé la somme de 700 euros chacune au titre de l’article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 3 : La présente décision sera notifiée à l’association de Défense de l’Environnement des Riverains de l’aéroport de Beauvais-Tillé, à l’association Regroupement des organismes de sauvegarde de l’Oise, à l’association contre les nuisances de l’aéroport de Tillé et à la ministre de la transition écologique.