Droit Aerien

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Utilisation de drones pour la surveillance d’une manifestation – Atteinte grave et disproportionnée au droit au respect de la vie privée – Tribunal administratif de Versailles, 10 septembre 2025, n°2510584

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Vu la procédure suivante :

Par une requête enregistrée le 9 septembre 2025, l’association « Vigie Liberté », représentée par Me Verdier, demande au juge des référés, saisi sur le fondement de l’article L. 521-2 du code de justice administrative :

1°) d’ordonner la suspension de l’exécution de l’arrêté du 9 septembre 2025 par lequel la préfète de l’Essonne a autorisé la captation, l’enregistrement et la transmission d’images au moyen de caméras installées sur des aéronefs sur la partie de son territoire relevant de la compétence de la direction interdépartementale de la police nationale le 10 septembre 2025 de 5 heures à 23 heures ;

2°) de mettre à la charge de l’Etat une somme de 1 500 euros en application des dispositions de l’article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

Sur la recevabilité de sa requête :

— bien que son siège social se situe sur le territoire de la commune de Paris, son objet statutaire, centré sur la protection des données personnelles et la liberté de circulation et de réunion, est directement concerné par l’arrêté attaqué qui autorise la captation d’images par des caméras aéroportées sur l’ensemble du territoire ; cette surveillance sur un vaste périmètre de la région Ile-de-France, à l’occasion d’une journée nationale de contestation, répond à une situation susceptible d’être reproduite dans d’autres départements ou communes, dans le cadre d’évènements similaires ; ces atteintes aux libertés fondamentales transcendent le cadre régional, dans un contexte national de mobilisation ; elle a donc bien intérêt à agir ;

Sur la condition tenant à l’atteinte grave et manifestement illégale portée à une liberté fondamentale :

— en octroyant une autorisation de captation, d’enregistrement et de transmission d’images au moyen de quatre caméras installées sur des aéronefs télépilotés dans un but qui n’est pas prévu par la loi ou qui excède manifestement les besoins, la préfète de l’Essonne a porté une atteinte grave et manifestement illégale au droit au respect de la vie privée qui comprend le droit à la protection des données personnelles ;

— en se fondant sur des considérations générales, sans fournir d’éléments concrets ou chiffrés, de statistiques, documents ou rapports précis sur des faits antérieurs similaires ni préciser aucune localisation spécifique des rassemblements attendus, la préfète de l’Essonne ne démontre pas que la mesure de police en litige est nécessaire ;

— la réalité du trouble à l’ordre public à prévenir n’est pas établie de manière proportionnée au périmètre et à l’amplitude autorisée ; en autorisant le survol de l’ensemble du département de l’Essonne, l’arrêté est manifestement disproportionné par rapport à la finalité invoquée ; cette étendue géographique excessive, amplifiée par l’utilisation simultanée de dix caméras aéroportées et une amplitude temporelle couvrant 24 heures porte ainsi une atteinte injustifiée à la vie privée de millions de personnes impliquées dans les évènements ;

— le territoire départemental est déjà équipé de systèmes de vidéosurveillance publique étendus dans les zones urbaines sensibles ; rien ne justifie que des moyens terrestres ne suffiraient pas pour une journée unique ;

Sur la condition d’urgence :

— elle est satisfaite dès lors que la préfecture n’a publié son arrêté au recueil des actes administratifs que le 9 septembre 2025, à la veille de la journée de manifestation et justifie une intervention du juge en quarante-huit heures ;

— elle est également satisfaite compte tenu du vaste périmètre couvrant le territoire du département de l’Essonne, exposant plus d’un million d’habitants.

Par un mémoire en défense enregistré le 9 septembre 2025, la préfète de l’Essonne conclut au rejet de la requête.

Elle soutient que :

— plusieurs associations ou collectifs tels que  » Bloquons tout ! « , tant au niveau national qu’en Essonne appellent, le 10 septembre à des manifestations d’ampleur visant les institutions républicaines ; les informations diffusées par les organisateurs permettent de prévoir une mobilisation d’ampleur exceptionnelle et la présence de manifestations disparates rendant très difficiles les opérations de maintien de l’ordre ;

— dans un contexte politique et social très tendu et marqué par la démission du Premier ministre, le mouvement du 10 septembre nécessite de la part des forces de sécurité intérieure une importante mobilisation de moyens pour y faire face afin d’assurer la protection et la sécurité des personnes et des biens ;

— de nombreux appels à des actions violentes sont lancés tant sur les réseaux sociaux que sur les boucles de la messagerie cryptée Telegram ;

— l’utilisation de drones, au regard de sa rapidité de déplacement, permet de redéployer plus efficacement les forces au sol ;

— la captation d’images au moyen de drones est proportionnée dès lors que la zone de survol a été délimitée sur le ressort de la zone de compétence de la police nationale exclusivement et qu’en raison du caractère disparate des risques de troubles à l’ordre public, il ne peut être défini une zone de captation ni un créneau précis par anticipation ;

— le loi n°2022-52 du 24 janvier 2022 qui permet l’autorisation de procéder à la captation, l’enregistrement et la transmission d’images au moyen de drone ne méconnaît pas le droit au respect de la vie privée, eu égard à l’objectif de valeur constitutionnelle de prévention des atteintes portées à l’ordre public ;

— la direction interdépartementale de la police nationale de l’Essonne ne dispose pas de moyens moins intrusifs ;

— les données récoltées dans le cadre de l’arrêté attaqué bénéficient d’importantes garanties prévues par la loi en matière de conservation et d’accès aux images ; les caméras sont configurées de sorte à ne pas pouvoir recueillir d’images de l’intérieur des domiciles ou de leurs entrées et ne présentent aucun dispositif de reconnaissance faciale.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

— le code de la sécurité intérieure ;

— le code de justice administrative.

La présidente du tribunal a désigné Mme Degorce, première conseillère, pour statuer sur les demandes de référés.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l’audience.

Ont été entendus au cours de l’audience publique du 10 septembre 2025 à 9 heures 30, en présence de Mme Petit, greffière d’audience :

— le rapport de Mme Degorce, juge des référés ;

— les observations de M. A, représentant l’association requérante, qui persiste dans ses précédentes conclusions par les mêmes moyens et soutient en outre que l’association « Vigie Liberté » a dû introduire son recours dans des délais contraints compte tenu de la publication tardive de l’arrêté contesté ; que cet arrêté a été pris en complément d’un arrêté interdépartemental autorisant le survol de la région Ile-de-France par un hélicoptère équipé d’une caméra ; outre le droit au respect de la vie privée, il porte également une atteinte grave et manifestement illégale à la liberté d’aller et venir ; la rédaction abstraite de l’arrêté, en l’absence d’éléments factuels, ne justifie pas la nécessité stricte et absolue de la mesure de police ; en outre, il reste imprécis sur la localisation de la zone susceptible de donner lieu à la captation d’images dès lors qu’il n’est pas précisé, ni par une carte, ni par des éléments descriptifs, les secteurs du territoire de l’Essonne relevant de la compétence de la direction interdépartementale de la police nationale ; en justifiant son arrêté par le besoin d’effectuer une physionomie rapide de la situation, la préfète de l’Essonne s’est fondée sur un motif qui n’est pas prévu par la loi ; l’arrêté attaqué ne justifie pas la nécessité de survoler l’ensemble des zones urbaines du département de l’Essonne, comprenant des parcs, des forêts, des lotissements pavillonnaires, des squares ; l’arrêté attaqué ne précise pas les caractéristiques techniques des drones utilisés ; eu égard à l’annonce des quatre-vingt mille policiers déployés sur le territoire national le 10 septembre 2025, la préfète ne justifie pas qu’elle ne pouvait utiliser d’autres dispositifs moins intrusifs pour la sauvegarde du droit au respect de la vie privée ;

— les observations de M. B, représentant la préfète de l’Essonne, qui persiste dans ses précédentes écritures et fait valoir en outre qu’il ne conteste ni la recevabilité de la requête, ni la condition d’urgence ; il soutient que, compte tenu de la nature disparate et éclatée des mouvements, il était impossible de prévoir des secteurs spécifiques de surveillance par drones ; dans l’Essonne, depuis ce matin à 6 heures, treize évènements ont été détectés concernant des blocages de lycées, des manifestations non autorisées, l’installation de barrières bloquantes et des premiers heurts ; ces évènements étaient impossibles à anticiper et ne pouvaient faire l’objet d’une cartographie préalable ; les notes blanches des services de renseignement ne sont pas communiquées dans ce type de procédure ; la stratégie des forces de police n’est pas dévoilée à l’avance ; l’arrêté est proportionné dès lors qu’il n’autorise l’usage de drones que sur la journée du 10 septembre 2025, de 5 heures à 23 heures ; la publicité de l’arrêté permet aux habitants du département de l’Essonne de savoir si leurs habitations se trouvent dans une zone où le survol de drones est autorisé ; l’utilisation de drones est très encadrée ; l’opérateur est le seul à avoir accès aux images qui sont conservées sept jours avant leur destruction, contrairement aux images de vidéosurveillance qui sont conservées trente jours ; les fenêtres et portes des bâtiments sont floutées ; les drones volant à une hauteur d’environ 30-40 mètres, ils ne peuvent capter des images permettant d’identifier des individus et il n’existe aucune interconnexion avec les fichiers de police ; si la préfète a justifié l’autorisation de drones par la possibilité de pouvoir effectuer une physionomie rapide de la situation, c’est bien pour indiquer que l’usage de ces drones n’a pas pour objet d’identifier les manifestants mais qu’ils ne visent qu’à aider les forces de l’ordre mobilisées sur le terrain ; l’arrêté attaqué précise que l’autorisation porte sur l’engagement de quatre caméras sur des drones validés par la direction générale de l’armement, conforme à la circulaire 9400 du 1er juillet 2019.

La clôture de l’instruction a été prononcée à l’issue de l’audience publique.

Considérant ce qui suit :

1. Par arrêté du 9 septembre 2025, la préfète de l’Essonne a autorisé la captation, l’enregistrement et la transmission d’images au moyen de caméras installées sur des aéronefs, sur la partie de son territoire relevant de la compétence de la direction interdépartementale de la police nationale, le 10 septembre 2025 de 5 heures à 23 heures. Par la présente requête, l’association « Vigie Liberté » demande au juge du référé-liberté de suspendre l’exécution de cet arrêté.

2. Aux termes de l’article L. 521-2 du code de justice administrative : « Saisi d’une demande en ce sens justifiée par l’urgence, le juge des référés peut ordonner toutes mesures nécessaires à la sauvegarde d’une liberté fondamentale à laquelle une personne morale de droit public ou un organisme de droit privé chargé de la gestion d’un service public aurait porté, dans l’exercice d’un de ses pouvoirs, une atteinte grave et manifestement illégale. Le juge des référés se prononce dans un délai de quarante-huit heures. »

3. En vertu de ces dispositions, il appartient au juge des référés d’ordonner toutes mesures nécessaires à la sauvegarde d’une liberté fondamentale à laquelle une autorité administrative aurait porté une atteinte grave et manifestement illégale dès lors qu’existe une situation d’urgence caractérisée justifiant le prononcé de mesures de sauvegarde à très bref délai et qu’il est possible de prendre de telles mesures. Celles-ci doivent, en principe, présenter un caractère provisoire, sauf lorsque aucune mesure de cette nature n’est susceptible de sauvegarder l’exercice effectif de la liberté fondamentale à laquelle il est porté atteinte.

Sur la condition relative à l’atteinte grave et manifestement illégale portée à une liberté fondamentales :

4. D’une part, le droit au respect de la vie privée, qui comprend le droit à la protection des données personnelles, et la liberté d’aller et venir, constituent des libertés fondamentales au sens des dispositions de l’article L. 521-2 du code de justice administrative. D’autre part, il appartient à l’autorité investie du pouvoir de police de prendre toute mesure pour prévenir une atteinte à l’ordre public. Les atteintes portées, pour des exigences d’ordre public, à l’exercice de ces libertés fondamentales doivent être nécessaires, adaptées et proportionnées.

5. Aux termes de l’article L. 242-5 du code de la sécurité intérieure :  » I – Dans l’exercice de leurs missions de prévention des atteintes à l’ordre public et de protection de la sécurité des personnes et des biens, les services de la police nationale et de la gendarmerie nationale () peuvent être autorisés à procéder à la captation, à l’enregistrement et à la transmission d’images au moyen de caméras installées sur des aéronefs aux fins d’assurer : 1° La prévention des atteintes à la sécurité des personnes et des biens dans des lieux particulièrement exposés, en raison de leurs caractéristiques ou des faits qui s’y sont déjà déroulés, à des risques d’agression, de vol () ainsi que la protection des bâtiments et installations publics et de leurs abords immédiats, lorsqu’ils sont particulièrement exposés à des risques d’intrusion ou de dégradation ; 2° La sécurité des rassemblements de personnes sur la voie publique ou dans des lieux ouverts au public ainsi que l’appui des personnels au sol, en vue de leur permettre de maintenir ou de rétablir l’ordre public, lorsque ces rassemblements sont susceptibles d’entraîner des troubles graves à l’ordre public ; () Le recours aux dispositifs prévus au présent I peut uniquement être autorisé lorsqu’il est proportionné au regard de la finalité poursuivie. « . Aux termes de l’article L. 242-4 du même code : » La mise en œuvre des traitements prévus aux articles L. 242-5 () doit être strictement nécessaire à l’exercice des missions concernées et adaptée au regard des circonstances de chaque intervention « . En vertu du IV de l’article L. 242-5 de ce code, l’autorisation requise est subordonnée à une demande qui précise, notamment, » () 2° La finalité poursuivie ; 3° La justification de la nécessité de recourir au dispositif, permettant notamment d’apprécier la proportionnalité de son usage au regard de la finalité poursuivie ; () 8° le périmètre géographique concerné « . Cette autorisation est délivrée par décision écrite et motivée du représentant de l’Etat dans le département. Elle détermine la finalité poursuivie et ne peut excéder le périmètre strictement nécessaire à l’atteinte de cette finalité.

6. Il résulte de ces dispositions, ainsi que l’a jugé le Conseil constitutionnel dans sa décision n° 2021-834 DC du 20 janvier 2022, que l’autorisation requise, qui détermine les finalités justifiant le recours à ces dispositifs, le périmètre strictement nécessaire pour l’atteindre ainsi que le nombre maximal de caméras pouvant être utilisées simultanément, ne saurait être accordée qu’après que le préfet s’est assuré que le service ne peut employer d’autres moyens moins intrusifs au regard du droit au respect de la vie privée ou que l’utilisation de ces autres moyens serait susceptible d’entraîner des menaces graves pour l’intégrité physique des agents. Cette autorisation ne saurait être renouvelée sans qu’il soit établi que le recours à des dispositifs aéroportés demeure le seul moyen d’atteindre la finalité poursuivie. Par suite, l’autorisation de recourir à la captation d’images au moyen de caméras installées sur des aéronefs repose sur une appréciation précise et concrète, au cas par cas, de la nécessité et de la proportionnalité du recours au traitement considéré.

7. En premier lieu, il résulte des termes mêmes de l’arrêté attaqué que la préfète de l’Essonne a fondé son autorisation d’autoriser la captation, l’enregistrement et la transmission d’images au moyen de caméras installées sur des aéronefs, sur la perspective de risques sérieux que des troubles soient commis en Essonne à l’occasion de la journée d’actions du 10 septembre 2025 au cours de laquelle plusieurs appels à blocages ont été lancés. Toutefois, elle ne fait état, ni dans son arrêté, ni dans son mémoire en défense, ni encore à la barre, d’aucune circonstance précise quant aux risques de troubles graves à l’ordre public spécifiques à son territoire qu’elle entend prévenir. A ce titre, ni les captures d’écran du collectif  » Bloquons tout !  » sur les réseaux sociaux ni l’extrait d’article de presse provenant d’un quotidien national, seules pièces produites à l’appui de ses écritures, ne mentionnent que des actions ou manifestations particulières seraient prévues sur le territoire du département de l’Essonne le 10 septembre 2025. Si le représentant du préfet indique à la barre que des blocages et des manifestations non autorisées ont déjà été constatés depuis 6 heures ce matin, ses allégations ne sont cependant corroborées par aucune pièce et ne permettent pas d’établir que ces premiers évènements seraient tels que le recours à l’usage de drones serait proportionné à la nécessité de sécuriser les biens, les personnes et les rassemblements.

8. En deuxième lieu, il résulte des termes mêmes de l’arrêté attaqué que le périmètre couvert par l’autorisation de déployer quatre caméras télépilotées concerne l’ensemble du territoire du département de l’Essonne relevant de la compétence de la direction interdépartementale de la police nationale. Si le représentant de la préfète soutient que, compte tenu de la nature disparate et éclatée du mouvement, il est impossible de connaître à l’avance la localisation exacte des manifestations, cette seule circonstance ne saurait justifier un périmètre couvrant l’intégralité des zones urbaines du département, au demeurant non expressément définies par une carte ou une liste de communes ou de secteurs en annexe de l’arrêté. L’association « Vigie Liberté » apparaît ainsi fondée à soutenir que la captation d’images autorisée par la préfète de l’Essonne excède le périmètre géographique strictement nécessaire à l’atteinte de la finalité poursuivie, en méconnaissance de l’article L. 242-5 du code de la sécurité intérieure.

9. Enfin, si l’arrêté attaqué se fonde sur la circonstance qu’il n’existe pas de dispositif moins intrusif au regard du droit au respect de la vie privée permettant de prévenir les troubles à l’ordre public et d’assurer la sécurité des effectifs de police, ces considérations générales ne sont toutefois étayées par aucun élément précis permettant d’établir que d’autres moyens, tels que l’utilisation du système de vidéosurveillance publique disposé dans le périmètre de l’arrêté ou le déploiement des forces de l’ordre mobilisées le 10 septembre, ne pourraient être utilisés ou seraient insuffisants ou que leur seul usage serait susceptible d’entraîner des menaces graves pour l’intégrité physique des agents.

10. Dans ces conditions, l’association « Vigie Liberté » est fondée à soutenir que l’arrêté contesté porte une atteinte grave et manifestement illégale au droit au respect de la vie privée.

Sur la condition d’urgence :

11. Une demande présentée au titre de l’article L. 521-2 du code de justice administrative implique, pour qu’il y soit fait droit, qu’il soit justifié d’une situation d’urgence particulière rendant nécessaire l’intervention d’une mesure de sauvegarde dans les quarante-huit heures.

12. En l’espèce, l’arrêté contesté de la préfète de l’Essonne a été pris le 9 septembre 2025. Par suite, l’autorisation délivrée par l’arrêté attaqué pour le lendemain est, par elle-même, de nature à caractériser une situation d’urgence, au sens des dispositions précitées de l’article L. 521-2 du code de justice administrative.

13. Par ailleurs, l’urgence de la suspension de l’arrêté contesté sur le fondement de l’article L. 521-2 du code de justice administrative doit être appréciée en tenant compte non seulement de ses effets sur les intérêts défendus par le requérant mais aussi de l’objectif de prévention des atteintes à l’ordre public auquel elle a pour objet de contribuer. Eu égard, d’une part, au nombre de personnes susceptibles de faire l’objet des mesures de surveillance en litige, d’autre part, aux atteintes qu’elles sont susceptibles de porter au droit au respect de la vie privée, et alors qu’il ne résulte pas de l’instruction que l’autorisation en cause soit justifiée par la prévention de troubles graves à l’ordre public, la condition d’urgence doit être regardée comme remplie.

14. Il résulte de tout ce qui précède que l’association « Vigie Liberté » est fondée à demander la suspension de l’exécution de l’arrêté du 9 septembre 2025 par lequel la préfète de l’Essonne a autorisé la captation, l’enregistrement et la transmission d’images au moyen de caméras installées sur des aéronefs sur la partie de son territoire relevant de la compétence de la direction interdépartementale de la police nationale, le 10 septembre 2025 de 5 heures à 23 heures. En application du deuxième alinéa de l’article R. 522-13 du code de justice administrative, il y a lieu, compte tenu de l’urgence, de décider que cette suspension est exécutoire dès la communication sur place du dispositif de la présente ordonnance aux parties.

Sur les frais d’instance :

15. Il y a lieu, dans les circonstances de l’espèce, de mettre à la charge de l’Etat sur le fondement de l’article L. 761-1 du code de justice administrative, une somme de 1 500 euros qui sera versée à l’association « Vigie Liberté ».

O R D O N N E :

Article 1er : L’exécution de l’arrêté du 9 septembre 2025 par lequel la préfète de l’Essonne a autorisé la captation, l’enregistrement et la transmission d’images au moyen de caméras installées sur des aéronefs sur la partie de son territoire relevant de la compétence de la direction interdépartementale de la police nationale, le 10 septembre 2025 de 5 heures à 23 heures est suspendue.

Article 2 : L’Etat versera 1 500 euros à l’association « Vigie Liberté » au titre des dispositions de l’article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 3 : La présente ordonnance est immédiatement exécutoire.

Article 4 : La présente ordonnance sera notifiée à l’association « Vigie Liberté », à la préfète de l’Essonne et au ministre de l’intérieur.