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Transfert des aérodromes appartenant à l’Etat – choix du bénéficiaire du transfert

Transfert d’un aérodrome appartenant à l’Etat – Loi 2004-809 du 13 août 2004 article 28 – cas de candidatures multiples  – appréciation du Préfet – concertation préalable (oui) – erreur manifeste d’appréciation (non) – rejet de la requête – Cour administrative d’appel de Lyon 6 avril 2010

 

 

COUR ADMINISTRATIVE D’APPEL DE LYON

 

N° 07LY02521

Inédit au recueil Lebon

1ère chambre – formation à 3

M. BEZARD, président

M. Gérard FONTBONNE, rapporteur

M. BESSON, commissaire du gouvernement

CABINET PHILIPPE PETIT & ASSOCIES, avocat

 

 

Lecture du mardi 6 avril 2010

 

Vu la requête, enregistrée le 13 novembre 2007, présentée pour la COMMUNE DE CHARNAY-LES-MÂCON (Saône et Loire) ;

 

La commune demande à la Cour :

 

1°) d’annuler le jugement n° 0602863 en date du 10 juillet 2007 par lequel le Tribunal administratif de Dijon a rejeté sa demande tendant à l’annulation de la décision du préfet de la région Bourgogne du 28 septembre 2006 rejetant sa candidature au transfert de propriété de l’aérodrome de Mâcon-Charnay ;

 

2°) d’annuler la décision litigieuse ;

 

3°) de mettre à la charge de l’Etat le versement d’une somme de 5 000 euros sur le fondement de l’article L. 761-1 du code de justice administrative ;

 

(…)

 

Considérant qu’aux termes de l’article 28 de la loi n° 2004-809 du 13 août 2004 relative aux libertés et responsabilités locales : I) La propriété, l’aménagement, l’entretien et la gestion des aérodromes civils appartenant à l’Etat à la date de publication de la présente loi sont transférés, au plus tard, le 1er mars 2007 et dans les conditions fixées au présent article, aux collectivités territoriales ou à leurs groupements dans le ressort géographique desquels sont situées ces infrastructures ; II) Sans préjudice des dispositions du V, toute collectivité territoriale ou groupement de collectivités territoriales mentionné au I peut demander, jusqu’au 1er juillet 2006, à prendre en charge l’aménagement, l’entretien et la gestion d’un ou de plusieurs aérodromes. Cette demande est notifiée simultanément à l’Etat ainsi qu’aux collectivités et groupements intéressés. Au cas où, pour un même aérodrome, aucune autre demande n’a été présentée dans un délai de six mois suivant cette notification, la collectivité ou le groupement pétitionnaire est réputé bénéficiaire du transfert. Si plusieurs demandes ont été présentées pour le même aérodrome, le représentant de l’Etat dans la région organise entre les collectivités et groupements intéressés une concertation, dont il fixe la durée, en s’efforçant d’aboutir à la présentation d’une demande unique. Si les collectivités et groupements participant à la concertation s’accordent sur la candidature de l’un d’entre eux, celui-ci est désigné bénéficiaire du transfert. En l’absence d’accord au terme de la concertation, le représentant de l’Etat dans la région désigne le bénéficiaire du transfert en tenant compte des caractéristiques de l’aérodrome, notamment de son trafic et de sa zone de chalandise, ainsi que des enjeux économiques et d’aménagement du territoire. La région est prioritaire si elle est candidate. Toutefois, si une collectivité territoriale ou un groupement assure la gestion de l’aérodrome concerné et a financé la majorité de ses investissements durant les trois dernières années précédant l’entrée en vigueur de la présente loi, cette dernière est prioritaire. Pour l’application du présent II, le représentant de l’Etat dans le département communique aux collectivités ou groupements sollicitant le transfert de compétence toutes les informations permettant le transfert en connaissance de cause de l’aérodrome concerné dans un délai de six mois (…) ; IV) Dans un délai d’un an à compter de la publication de la présente loi, les collectivités ou groupements visés au I peuvent demander un transfert à titre expérimental, dont l’échéance ne peut excéder le 31 décembre 2006 (…). ;

 

Considérant qu’en application de ces dispositions la commune de Mâcon et la commune de Charnay-les-Mâcon, se sont portées candidates au transfert de l’aérodrome de Mâcon Charnay appartenant à l’Etat ; que, par l’arrêté litigieux du 28 septembre 2006, le préfet de la région Bourgogne a retenu la candidature de la commune de Mâcon ;

 

Sur la légalité externe :

 

Considérant, en premier lieu, que la décision contestée qui rejette la candidature de la commune de Charnay-les-Mâcon ne constitue pas une décision défavorable imposant des sujétions dont la loi du 11 juillet 1979 exige la motivation ; que, si l’article 28 précité de la loi du 13 août 2004 fixe les critères au regard desquels le choix de la collectivité bénéficiaire du transfert doit être opéré, il ne prévoit pas davantage la motivation de la décision opérant ce choix ; que, par suite, si cette décision, qui n’avait pas à être motivée, comporte néanmoins l’indication des motifs sur lesquels elle est fondée, le moyen tiré du caractère insuffisant de cette motivation est inopérant ;

 

Considérant, en deuxième lieu, d’une part, que, par lettre du 2 mars 2005, adressée au préfet de Saône-et-Loire le maire de Charnay-les-Mâcon a fait part de l’intention de la commune d’être candidate au transfert de l’aérodrome en demandant des informations complémentaires ; que, par lettre du 13 mars 2005, le préfet de Saône-et-Loire a accusé réception de ce courrier en indiquant que pour les collectivités qui entendraient demander un transfert à titre expérimental la date limite de dépôt des candidatures était le 16 août 2005, cette indication constituant le simple rappel des dispositions de l’article 28 IV de la loi du 13 août 2004 ; que la commune de Mâcon n’ayant pas demandé un transfert à titre expérimental, cette date limite n’était pas opposable à sa candidature ; que, d’autre part, la candidature de la commune de Charnay-les-Mâcon a été formalisée par délibération du conseil municipal du 26 septembre 2007 ; qu’il résulte des dispositions précitées de la loi du 13 août 2004 que les candidatures concurrentes d’autres collectivités devraient être présentées dans un délai de 6 mois à compter de la notification qui devait leur être faite de cette première candidature ; que la candidature de la commune de Mâcon formée par délibération du conseil municipal du 14 novembre 2005 a, dès lors, été présentée dans le délai requis ; que le moyen tiré de la tardiveté de cette candidature doit, en conséquence, être écarté ;

 

Considérant, en troisième lieu, qu’il ressort des pièces du dossier que la convocation adressée aux conseillers municipaux pour la séance du conseil municipal de Mâcon du 14 novembre 2005 mentionne le transfert de l’aérodrome constituant le point n° 46 de l’ordre du jour ; que cet envoi était accompagné de la note de synthèse prévue par l’article L. 2121-12 du code général des collectivités territoriales ; qu’il ressort de l’extrait du registre des délibérations que plus de la moitié des conseillers en exercice étaient présents ; qu’ainsi, le moyen tiré de l’irrégularité de la délibération du conseil municipal du 14 novembre 2005 manque en fait ;

Considérant, en quatrième lieu, que le préfet de Région a adressé le 14 février 2006 au maire de Charnay-les-Mâcon une lettre l’invitant à se rapprocher du maire de Mâcon, a rencontré successivement les deux maires en juillet et août 2006 et a ensuite entretenu des contacts par des courriers et des appels téléphoniques ; qu’ainsi une période de 7 mois, ponctuée de multiples échanges, s’est écoulée entre la lettre susmentionnée du 14 février 2006 et la décision litigieuse ; que les dispositions précitées de l’article 28 de la loi du 13 août 2004 se bornant, sans autre indication, à prescrire au préfet d’organiser une concertation, il appartient à celui-ci d’en déterminer les modalités adaptées à chaque situation, et d’apprécier à partir de quel moment la concertation trouve son terme ; que l’organisation de cette concertation n’implique, dès lors, pas nécessairement que l’ouverture d’une phase de concertation soit formellement notifiée aux collectivités concernées et que sa durée soit alors fixée ; que le préfet ayant, comme il a été dit ci-dessus, mis en oeuvre un processus de concertation, alors même que le maire de Charnay-les-Mâcon objectant que la demande de la commune de Mâcon aurait été présentée à titre expérimental et aurait en conséquence été tardive, lui avait, dès le 22 février 2006, indiqué qu’une concertation était sans objet, le moyen tiré de la méconnaissance d’une formalité substantielle ne peut, par suite, qu’être écarté ;

 

Sur la légalité interne :

Considérant, en premier lieu, que la commune de Charnay-les-Mâcon fait valoir qu’il résulte des dispositions de l’article 28 de la loi du 13 août 2004 qu’une candidature n’est prioritaire que si la collectivité qui la présente a, à la fois, assumé la gestion de l’aérodrome et le financement de la majorité des investissements ; que, par suite, la candidature de la commune de Mâcon ne pouvait être regardée comme prioritaire, dès lors que la gestion de l’aérodrome est assurée par la commerce et d’industrie ; qu’il résulte, toutefois, des termes même de la décision litigieuse que, si elle retient comme élément de choix de la collectivité bénéficiaire du transfert que la commune de Mâcon a apporté une contribution financière significative, elle ne déduit pas de cette circonstance que sa candidature avait pour ce motif un caractère prioritaire ; que le moyen tiré de ce que la décision contestée repose sur une erreur de droit doit, dès lors, être écarté ;

 

Considérant, en second lieu, qu’en retenant la candidature de la commune de Mâcon au regard, notamment, de la circonstance qu’elle est déjà propriétaire d’une partie de l’emprise et qu’elle a apporté une contribution financière, le préfet de la région de Bourgogne n’a pas, alors même que l’infrastructure est placée sur le territoire de la commune de Charnay-les-Mâcon, et en l’absence de candidature de la communauté d’agglomération, commis d’erreur manifeste d’appréciation ;

 

Considérant que, sans qu’il soit besoin de se prononcer sur les fins de non recevoir opposées par l’Etat et la commune de Mâcon, il résulte de l’ensemble de ce qui précède que la commune de Charnay-les-Mâcon n’est pas fondée à soutenir que c’est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif a rejeté sa demande ;

 

(…)

 

DECIDE :

 

Article 1er : La requête de la COMMUNE DE CHARNAY-LES-MÂCON est rejetée.

 

(…)